Une question d’équilibre dans un contexte particulier
Le coronavirus a hélé et happé la terre entière avec une dextérité digne des plus grands scenarii de films d’horreur ; l’énergumène, à la forme étrange, est craint comme un monstre insaisissable. Le monde entier terrorisé s’est cloitré et a observé la minuscule bête, l’a jaugée et lui a donné une force immense à travers une énergie négative collective qui a décuplé sa capacité de nuisance.
À son apparition sur les lointaines terres chinoises, le continent africain ne s’est véritablement pas senti concerné, malgré les flux des échanges économiques, malgré les images alarmantes et les fermetures de villes comme Wuhan, personne ne se préoccupait de ce qui semblait être une grippe féroce certes, mais rien de plus.
La peur a saisi le monde lorsque le virus a atteint les continents européens et américains, la peur de l’inconnu, la peur de la mort qui rôde, cette peur collective a intensifié la propagation de l’angoisse mortifère qui a saisi le monde.
Le continent Afrique a donc reçu la Covid-19 sur le tard, sans la peur gigantesque qui s’est saisie du reste du monde, une épidémie, ou une pandémie, mais ça ne change pas grand-chose pour le continent.
On note une grande résilience des femmes africaines habituées à combattre le paludisme, Ebola, l’épidémie annuelle de méningite et toutes les épidémies cycliques, dont presque personne ne s’émeut, et dont les ravages font des millions de victimes chaque année.
Des femmes résilientes
Les femmes représentent la majorité des travailleurs des systèmes de santé et de soins, elles souvent sous-rémunérées. Elles sont également majoritaires dans les autres services de base, tels que les marchés, les petits restaurants ou la vente d’aliments dans les quartiers et sont confrontées à des problématiques sans précédent de précarité des conditions de logement et de confinement, et d’une surcharge de responsabilités en matière de cuisine, de nettoyage et de soins.
Les restrictions sur la mobilité ont accru la vulnérabilité des victimes de maltraitance, et ont intensifié leurs besoins en services de protection, cela pose un problème majeur, de santé physique et mentale, dénoncé par les femmes du monde entier.
On peut dire que le capital culturel des Africaines est le cordon virtuel qui attache fermement leur pagne autour des reins. Elles ne s’en départissent pour ainsi dire jamais. À la force de leur pagne, elles soutiennent leur famille et leur communauté. Elles les portent toutes, grâce à un caractère impétueux et à une pugnacité sans pareille. Elles permettent à chacun de relever stoïquement la tête face aux aléas de la vie. Elles sont cheffes de famille, médecins, juristes, cheffes d’entreprise, commerçantes, agricultrices, syndicalistes, activistes, mais s’engagent sans ambages dans la vie associative, culturelle, politique c’est-à-dire dans tous les domaines de la vie sociale et économique. Les femmes africaines sont de tous les corps de métier et elles allient avec dextérité les compétences professionnelles les plus pointues aux us et coutumes les plus sensibles avec une pointe de vie globalisée et une maitrise hors pair des habiletés sociales. Leur bravoure et leur sens des responsabilités forcent l’admiration.
La conciliation travail-famille est une aptitude dont elles n’ont généralement pas conscience tant la gestion des affaires familiales leur est automatiquement allouée. Il est socialement normal que cette lourde tâche qui leur est attribuée ne souffre pas de contestation, même si par ailleurs, l’on exprime le besoin impérieux de voir les femmes évoluer dans un milieu professionnel qui leur permet généralement de nourrir la famille entière, d’habiller les enfants et de s’occuper de frais de scolarité. Nous ne disposons pas de statistiques fiables dans ce domaine, mais très peu de femmes bénéficient de l’aide de leur conjoint dans la gestion des travaux domestiques. Certaines femmes bénéficient d’une assistance ménagère payée par leurs soins, mais elles doivent elles-mêmes gérer toute la logistique de l’effectivité du bien-être familial.
Les femmes africaines développent des compétences sociales pour allier les structures et les valeurs familiales au contexte professionnel afin de bénéficier de la reconnaissance sociale. Les mesures de conciliation institutionnelles sont inexistantes puisque la majorité des femmes travaillent dans un milieu professionnel informel. Les modèles internationaux ne peuvent donc en aucun cas être la référence.
Dans le contexte actuel de la pandémie Covid-19, le télétravail semble être un luxe dont la majorité des Africaines ne peuvent bénéficier. Alors que les fonctionnaires et la majorité des travailleurs du privé continuent à percevoir leur salaire, les travailleurs indépendants et du secteur informel sont durement touchés et ne peuvent prétendre à aucune rémunération.
Un comportement assertif dans la conduite de la gestion des personnes
On pense à tort que les femmes leaders sont peu nombreuses du fait qu’elles occupent en général des positions moindres en termes de responsabilités professionnelles, et l’on omet sciemment de faire valoir leur leadership dans la sphère sociale en termes d’habiletés sociales et de responsabilités familiales, comme si ces aptitudes sont moins valeureuses que celles déployées dans la sphère professionnelle.
Le leadership n’est pas lié qu’à la sphère professionnelle, la gestion des affaires citoyenne, politique et communautaire est d’une importance capitale dans l’organisation et les équilibres sociaux. Il faut changer la culture des schémas prêts à utiliser et créer un leadership en fonction des valeurs et des compétences, il faut sortir du leadership hiérarchique dominant, et de celui conquérant qui est basé sur les rivalités et la compétition.
Si l’on considère qu’un leader doit savoir créer du sens et savoir se comporter, être capable de rallier autour d’idées stimulantes et avoir le sentiment d’accomplir une mission et de poursuivre un but plus grand que soi en servant la communauté tout en focalisant sur les talents des autres. On peut comprendre que le leadership est présent en permanence dans les domaines d’action des femmes.
Le leadership des femmes africaines est aujourd’hui incontestable, elles jouent un rôle majeur dans toutes les sphères de la vie sociale, et s’imposent en partenaires déterminées à participer activement à la conduite du changement de société. L’extrême pauvreté de la majorité des femmes, leur faible accès à l’éducation, à la formation, aux soins, à la terre, aux ressources ; les problèmes d’assainissement causés par l’absence de raccordement à l’eau potable, la difficulté de la conciliation travail-famille, le non-respect de leurs droits et la non-reconnaissance de leur valeur ajoutée malgré leur engagement fort et absolu dans tous les secteurs économiques et principalement dans les secteurs agricoles et informels posent de plus en plus un problème éthique.
Face aux multiplications des lois, des résolutions et à l’inefficacité de leur application pour un meilleur équilibre social les femmes du continent africain par leur engagement sur de multiples fronts d’apaisement, de travail, de dignité, d’abnégation portent sur leurs épaules apparemment frêles les espoirs de tout un continent. Et pour sublimer leurs actions diverses et concrètes sur le terrain dans ce contexte particulier de pandémie, elles demeurent une force de proposition incontournable et méritent d’être entendues et associées à toutes les décisions sociétales, économiques et politiques majeures où leur leadership ne sera pas une exception, mais la norme. Elles veulent sortir des statistiques négatives des pouvoirs publics nationaux et internationaux pour enfin faire triompher l’égalité sociale contre les certitudes obsolètes. La solution se trouve dans l’émergence des femmes et d’hommes accomplis et attentifs en toute conscience à la problématique de l’équité du genre.
Fatoumata KANE
Webinaire NdyeNubian
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