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DEDE DIDI : « J’irai jusqu’au siège de l'ONU pour plaider la protection effective des femmes»

Mme Dede Didi organise chaque année au Sénégal un événement culturel, « Dak’art, écoutez-nous aussi ! », qui célèbre l’entrepreneuriat féminin. Dans cette entrevue, elle dévoile ses perspectives pour l’autonomisation de la femme africaine.


Bonjour Mme Dede Didi. C’est un plaisir pour nous de vous recevoir dans notre magazine. Voudriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?


Bonjour ! Je suis une femme entrepreneure sociale qui crée des événements culturels et pacifiques dont l’objectif principal est de faire la promotion de la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.


On vous connaît très active dans le combat de la valorisation de la femme africaine. Quel est selon vous l’état des lieux de la condition féminine au Sénégal ?


Comme toute société régie par des normes, la nôtre est dictée par une organisation patriarcale où la Femme est reléguée au second plan. Elle doit une dévotion et une soumission entière à l’Homme. Dans notre éducation, elle est le vecteur principal chargé de transmettre ces valeurs-là aux garçons qui seront sous sa coupole durant son parcours de vie.

En général, la femme sénégalaise est moulée dans cette meule qui la forme d’abord à devenir une fille exemplaire, puis une bonne femme. Elle a l’obligation sociale d’être une épouse et une mère parfaite, protectrice des valeurs et surtout, entretenant son ménage avec la plus grande discrétion possible. Dans ce schéma, il n’est malheureusement pas prévu une prise en charge individuelle ainsi qu’une prise en compte du développement personnel et économique de la Femme fille, épouse et mère. Figurez-vous qu’à notre époque, l’époux a toujours le droit d’acceptation ou de refus que son épouse travaille ou pas.

Comme toute organisation sociale, ce sont des pratiques acceptées et approuvées par l’entourage de la Femme. Globalement, la femme sénégalaise reste combative et dévouée, mais fait face à des choix sociaux dépendant entièrement du régime patriarcal en place.


Vous êtes la promotrice de « Dak’art, écoutez-nous aussi ! », dont la deuxième édition a eu lieu à Dakar les 3 et 4 juillet 2021. Comment est née cette initiative ?


La première édition de « Dak’art, écoutez-nous aussi ! » s’est déroulée en novembre 2020. Cette initiative est juste une suite logique de mon combat et de notre volonté de promouvoir le savoir-faire de la femme, dans les domaines l’artisanat et la maroquinerie notamment. L’événement est en fait une sensibilisation à travers le travail effectué par les femmes au sein de notre société qui lui impose un canevas de conduite.


Quel est le but de cet événement ?


L’objectif justement, c’est de sensibiliser sur les violences conjugales à travers l’art et l’artisanat. Mais toujours dans le but d’allier la sensibilisation à une action qui encourage l’autonomisation des femmes et soutenir ainsi leurs entreprises créatives.


« Dak’art, écoutez-nous aussi ! » est donc un rendez-vous culturel peint aux couleurs féministes. Il est exclusivement organisé par les femmes dans l’optique de faire valoir leur savoir-faire dans les secteurs de l’artisanat, la maroquinerie, la peinture, l’alimentation et autres. Est-ce qu’il vous arrive de recevoir aussi des soutiens venant des hommes ?


Je dirai plutôt que c’est un rendez-vous culturel aux couleurs de défense des droits de la femme et de lutte active, mais pacifique contre les formes de violences que subissent les femmes dans mon pays.

Nous avons effectivement eu le soutien très proactif d’un professeur d’université privée qui a déployé une équipe de jeunes femmes étudiantes dans le projet.


Dede Didi, est-ce que vous avez des personnes à remercier en particulier pour l’organisation de Dak’art dont les deux premières éditions ont été une véritable réussite ?


Absolument ! Les marraines de la deuxième édition, en l’occurrence Dr Ndèye Fatou Ndiaye, Mme Khadijatou Cissé Seck et Nogaye Ndiaye Mourgaye. Je remercie sincèrement Mme Fatoumata Kane, Pr Fatimata Diallo et toutes les participantes qui ont fait confiance au projet.

Pensez-vous vraiment que ce n’est qu’à travers l’art et la culture que la femme africaine réussit à s’émanciper et à se faire écouter ?


Seule une synergie entre l’art, la culture, l’autonomisation comme étant un levier de pouvoir économique, la politique, le législatif et surtout la justice, pourrait nous permettre d’accéder à une émancipation.

Il est facile de se faire écouter. Mais il est plus efficace de se faire écouter dans un mécanisme durable aux objectifs clairs œuvrant pour la sécurité juridique, judiciaire, économique, politique et sanitaire pour toutes les femmes sénégalaises.


Pouvez-vous déjà nous parler de quelques éventuelles innovations pour les prochaines éditions ?


Pour le moment, toute innovation dépendra de l’évolution ou de la régression de la COVID dans notre pays.


Jusqu’où comptez-vous aller pour redorer le blason de la condition de la femme sénégalaise et africaine en général ?


J’irai jusqu’aux Nations Unies pour plaider et agir dans l’objectif de renforcer les capacités structurelles pour une protection effective des femmes à l’image des pays comme la Tunisie et particulièrement la Suisse qui ont concrètement avancé dans ce sens ces 50 dernières années.


Mme Dede Didi, merci d’avoir répondu à nos questions. Votre mot de fin ?


Je suis une femme qui met en avant les valeurs intrinsèques de toutes les communautés ethniques et religieuses confondues du Sénégal, dans ce combat contre les violences physiques, morales, économiques faites aux femmes.

Il est donc très important pour moi de garder nos valeurs en vue, d’éviter de se radicaliser et surtout de personnaliser le débat durant les actions à mener pour contribuer à l’éradication des formes de violences citées.

L’objectif doit être commun et propre à nos valeurs au détriment de l’importation de valeurs qui ne sont pas les nôtres.

L’urgence, c’est de reconnaître que les violences sont un méfait universellement reconnu, et de nous battre de manière globale et coordonnée pour qu’il y’ait une tolérance zéro dans le monde entier pour que la femme qui respecte la loi et les principes du vivre-ensemble pour le bien-être de tous se sente en sécurité partout.

En dernier lieu, le fait de se dire que c’est une action pour notre génération et la génération future permet de comprendre que ce n’est pas un combat de leadership, mais une lutte où chacun apporte sa pierre à l’édifice pour construire un monde meilleur.


Par Boris Noah


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