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Diébédo Francis Kéré : une fierté africaine

Diébédo Françis Kéré fait la fierté de son Burkina Faso natal et de l’Afrique tout entière, avec ses réalisations qui suscitent une grande attention à travers le monde. En faisant de l’architecture une passion, le natif de Gando a réussi à se hisser au sommet en remportant le Prix Pritzker 2022, pour ses constructions qui prennent en compte les difficultés climatiques et financières de l’Afrique.





Un pont entre l’Afrique et l’Occident


Lors de la conférence « Bridging the Gap » qui s’est tenue au centre d’architecture de Bordeaux en 2012, Diébédo Francis Kéré affirmait : « mon objectif est de jeter un pont reliant l’Afrique et les pays développés, où, finalement, bâtir selon des critères de durabilité se révèle être un point commun ». Cet objectif s’est nourri par son parcours construit entre le Burkina Faso et l’Allemagne, et se matérialise par ses réalisations qui sont un éclectisme des cultures africaine et occidentale.

Diébédo Francis Kéré est né en 1965, à Gando, un village situé à deux cents kilomètres de Ouagadougou, la capitale burkinabé. À cette époque, le village gît dans une extrême pauvreté et n’a pas d’école primaire. Fils aîné du chef, il est envoyé par ce dernier à Ouagadougou, à l’âge de sept ans, pour aller l’école. Il est probablement le premier enfant de Gando à partir à l’école. Plusieurs années plus tard, Francis Kéré obtient son Certificat d’Aptitude Professionnelle en menuiserie et devient charpentier. Mais de plus en plus, le bois se fait rare au Burkina Faso et le métier de charpentier qu’il a embrassé n’est plus trop porteur d’opportunités.

Alors qu’il travaille pour une ONG allemande qui œuvre pour le développement des formations techniques pour les jeunes burkinabé, Francis Kéré obtient une bourse qui lui permet d’aller en Allemagne. Pendant cinq ans, à côté de petits boulots pour survivre, il fait des cours du soir et réussit à passer son Baccalauréat. En 1995, il entame ses études d’architecture. À partir de ce moment, il décide de trouver les moyens pour construire une école primaire dans son village natal, un rêve qu’il avait toujours eu. Il est donc encore étudiant lorsqu’il décide de créer une association afin d’obtenir des financements pour réaliser son projet. En 2000, avec les moyens qu’il a pu rassembler, il lance la construction de l’école primaire de Gando, dont les travaux prennent fin en 2001. C’est le début de ses réalisations ingénieuses.

Des réalisations ingénieuses


L’architecte burkinabé met sur pied son premier projet en 2001, une école primaire construite dans son village natal. Sa particularité réside dans sa réalisation en argile fortifiée avec du ciment et des briques de terre. Ce qui permet d’absorber la chaleur et d’avoir de l’air frais à l’intérieur du bâtiment. La structure prévoit l’échappement de la chaleur par un plafond en briques soutenu par des poutres en ciment. Le toit, d’un design tout à fait différent, est surélevé et large afin de suffisamment intégrer la lumière et de faire circuler l’air. Cette réalisation originale a valu le Prix Aga Khan d’architecture à Diébédo Francis Kéré, en 2004, lequel est attribué tous les trois ans aux porteurs de projets d’aménagement qui répondent aux besoins des sociétés essentiellement musulmanes.

La réalisation de l’école primaire de Gando a été le déclic de la renommée internationale de Francis Kéré. L’architecte a construit des établissement scolaires, des espaces publics et des hôpitaux au Burkina Faso, au Bénin, au Mali, au Togo, au Kenya, au Soudan, au Mozambique. Il a notamment bâti l’école secondaire de Dano et le centre de santé de Léo, au Burkina Faso. Il a construit de nouveaux aménagements dans le Parc national de Bamako, au Mali. Au Kenya, mais aussi une Start up Lions Campus, un établissement inspiré par les nids de termites, dédié aux technologies de l’information et de la communication. On citera enfin la construction en cours des Assemblées nationales du Bénin et du Burkina Faso qui font partie de ses projets les plus ambitieux.

Le créateur burkinabé a également conçu des structures en Europe et aux États-Unis. Il est devenu le premier architecte africain à créer le pavillon de la Serpentine Gallery de Londres, en 2017. C’est une œuvre provisoire réalisée chaque année, depuis 2000, par un architecte connu à l’échelle internationale. Il est question d’inviter un architecte qui n’a jamais bâti en Angleterre à concevoir un pavillon d’été. Pour le faire, Kéré s’est inspiré des arbres de son village natal. Par ailleurs, il a produit en 2019 des designs pour le célèbre festival Coachella Valley Music and Arts qui se déroule chaque année en Californie, aux USA. Sa réalisation était baptisée « Sarbalé Ke » — Maison de la célébration.


Lauréat du Prix Pritzker 2022


« Je n’avais jamais imaginé que le travail que je fais, que j’ai toujours considéré comme une affaire personnelle, puisse un jour me valoir la reconnaissance de la Fondation Pritzker. La surprise, très honnêtement, a été énorme. Et si je mesure aujourd’hui le devoir, la grande responsabilité que cela implique, je n’arrive toujours pas à y croire complètement », affirmait-il après avoir reçu le Prix Pritzker en mars 2022.

Le Prix Pritzker est la plus grande distinction d’architecture dans le monde. Il est considéré comme le Prix Nobel de l’architecture. Diébédo Francis Kéré est devenu le premier Africain à recevoir ce prestigieux prix, une récompense du travail acharné de celui qui s’est mis au service de l’Afrique. Ses œuvres sont à voir comme une valorisation de l’Afrique et une réponse à certains problèmes que rencontrent les Africains au quotidien. Ses constructions intègrent les préoccupations liées au climat et à la paupérisation. Il utilise le matériau local auquel il ajoute une touche de modernité et le résultat est remarquablement beau.

Grâce à toutes ces réalisations d’une ingéniosité remarquable, Diébédo Francis Kéré est en train d’écrire une belle histoire de l’architecture. Il a, en effet, reçu d’autres distinctions non moins importantes parmi lesquelles : Le Global award for sustainable architecture (2009), le BSI Swiss architectural award (2010), le Holcim award for sustainable construction (2011), le Prix d’architecture Erich-Schelling (2014), Arnold W. Brunner Memorial Prize (2017), le Prix du Prince Claus (2017), la médaille Thomas Jefferson en architecture (2021). Ses réalisations avec des matériaux locaux, leurs coûts moins élevés et leur adéquation avec le phénomène grandissant du réchauffement climatique devraient davantage inspirer les Africains afin de renforcer le capital culturel du continent.


Boris Noah


1 - https://www.lemonde.fr/culture/article/2022/03/15/francis-diebedo-kere-prix-pritzker-2022-meme-les-plus-depourvus-ont-droit-au-confort-et-a-la-beaute_6117617_3246.html

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