L’ex-président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a été acquitté par la cour pénale internationale (CPI) le mercredi 31 mars 2021. Il partage le même verdict que Charles Blé Goudé ex-chef du mouvement des jeunes patriotes, son Co accusé des crimes commis contre l’humanité liée aux violences postélectorales du 28 novembre 2010 au 4 mai 2011 en Côte d’Ivoire. Ces deux hommes politiques ont été absents de leur pays pendant dix ans.
Tout commence en 2010. La Côte d’Ivoire organise les élections présidentielles. Alassane Dramane Ouattara (ADO) est l’heureux élu du peuple. Son rival Laurent Gbagbo ne reconnaît pas sa victoire et la crise éclate. ADO est présentement président de la Côte d’Ivoire, il vient de briguer un troisième mandat, allant à l’encontre de la constitution.
Révolutionnaire des années 80, Laurent Gbagbo est parmi les premiers hommes politiques à avoir combattu les idéaux de Houphouët Boigny après les indépendances. Sa libération fait en ce moment, la une des informations ivoiriennes.
Son retour en Côte d’Ivoire paraît imminent pour les partisans du FPI (Front populaire ivoirien) de la branche « Gbagbo ou rien ». Ils espèrent un nouvel élan politique qui fera le contrepoids face au pouvoir en place actuellement. Cela augure, semble-t-il, une renaissance pour Laurent Gbagbo.
La justice a triomphé !
Laurent Gbagbo a toujours plaidé non coupable des crimes commis pendant la crise de 2010 à 2011 qui a causé plus de 3 000 morts, et fait sombrer la Côte d’Ivoire dans une guerre civile.
Avec la requête au Conseil Constitutionnel en fin 2010, Laurent Gbagbo espérait des résultats plus transparents. Il a finalement été arrêté le 11 avril 2011 et incarcéré à La Haye aux Pays-Bas. Le 6 mai 2011, Alassane Ouattara est proclamé président par le Conseil Constitutionnel avec 54,10 % contre 45,9 % pour Laurent Gbagbo, au second tour. Généralement, en cas de contentieux constitutionnel suivant la période de la publication des résultats, à la suite des échéances électorales, des recours contre les fraudes n’aboutissent pas.
Au cours du procès, la partie demanderesse n’a fourni aucune preuve consistante contre Laurent Gbagbo et son co-accusé Charles B. Goudé. Après dix ans de procédure judiciaire, l’affaire est enfin tranchée. Le 31 mars 2021, les juges de la Chambre d’appel de la CPI ont révoqué toutes les conditions sur la mise en liberté de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Ils ont chargé le greffier de la CPI à prendre les dispositions nécessaires pour le transfert en toute sécurité des deux hommes vers un ou plusieurs Etats d’accueil. L’ancien président ivoirien réside en Belgique.
Vers la renaissance d’un combat inachevé.
Ce grand meneur s’est engagé en affaires publiques avec une vision panafricaniste. Les militants du Front populaire ivoirien (FPI) ont certainement été les premiers à se réjouir de l’acquittement de leur leader politique. C’est un parti politique de l’opposition qui fut autrefois un mouvement patriotique, créé par Laurent et son épouse Simone Gbagbo, pour l’instauration du multipartisme en 1988. Il se réclame une appartenance au socialisme démocratique. Durant la période d’emprisonnement de leur leader, le parti s’est divisé en deux : les partisans du couple Gbagbo et les pourfendeurs d’un renouveau qui refusent toute forme de violence verbale et de passivité face aux échéances électorales organisées dans le pays. Une guerre interne éclate et met deux leaders mis en avant : Pascal Affi N’Guessan et Aboudramane Sangaré.
Le 07 mars 2021, après dix ans de boycott des élections, les acteurs du FPI de la branche « Ggabgo ou rien » ont participé aux législatives avec la forte espérance de marquer encore une fois l’histoire de la politique ivoirienne. Le but étant d’empêcher le président Alassane Ouattara d’avoir la majorité dans l’assemblée, par une alliance avec les différents mouvements pour la démocratie, notamment celui d’Henri Bédié Konan.
Les sympathisants du FPI, enthousiasmés par la libération de leur leader, préparent un retour spectaculaire de celui-ci en Côte d’Ivoire. Au sortir de La Haye, Laurent Gbagbo a eu en sa possession son passeport. Tous les Ivoiriens pensent que l’ancien président a le grand désir de rentrer au pays pour continuer son combat politique. La question est de savoir si le moment est opportun.
Il y a une autre réalité qui est celle d’un éventuel règlement de compte entre membres de son mouvement : le FPI. Le défi étant de réconcilier l’ensemble des partisans autour d’une cause commune, afin de cheminer vers une reconquête du pouvoir.
Juvenale OBILI

Crédit photo REUTERS
Comments